Quid des DNVB : la mort des commerces ?

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par Christophe de Rolland et Enéas Lima

Digital Native Vertical Brands, c’est un terme créé par Andy Dunn, le fondateur de Bonobos.

Une DNVB combine le concept d’une marque unique née et opérant verticalement dans le net. Ce dernier serait la solution ultime pour s’adresser à tous: du consommateur jusqu’au dernier maillon amont de la supply chain.

Son segment de marché se trouve principalement chez “les branchés” du commerce en ligne, population majoritairement dominée par les millenials.

La notoriété de Bonobos et de Warby Parker en ont fait un symbole de modernité, trop souvent simplement exploité en tant que tel dans des storytelling construites sur une vérité sélective, parfois  revisitées et dans l’espoir d’un “jack pot”.

Prospectons un peu sur les problématiques de leur avenir tout en tenant compte que l’exemple phare, Bonobos, a mis 10 ans pour atteindre son point d’équilibre et que sa réussite est plutôt mesurée par le nombre de chiffres dans le chèque fait par Walmart pour acheter l’entreprise que par une réelle réussite économique au sens P&L du terme.

C’est un modèle ancré parmi les milleniums, une clientèle jeune et branchée mais qui dans dix ans se transformera en de jeunes familles démarrant une période de vie de 15 à 20 ans focalisée prioritairement sur leurs enfants et sur un crédit immobilier.

Ainsi le futur de ces marques dépendra de leur capacité d'adaptation à une nouvelle génération qui exigera encore des efforts marketing très importants dans ce créneau de “distribution” dans lequel les clients seront toujours attirés par la nouveauté, et caractérisé par l'“éphémérité” des modes lancées par les influenceurs.

D’un autre  côté, si la tendance des consommateurs à valoriser de plus en plus un commerce local se poursuit, la pression pour se lancer dans l’exploitation en magasin augmentera, exigeant là aussi encore plus d’investissements. Cette situation poussera  les DNVB vers un terrain de jeu où les marques traditionnelles ont beaucoup plus d’expérience et une assise fort probablement plus compétitive. La difficulté d’adaptation de ce mouvement dans le business model DNVB est visible par la timidité de l’approche des premières qui ont osé tâtonner le terrain.

Est-ce plus efficace quand on vient dans l’autre sens ? En clair quand on vient du “retail”. Oui, nous le pensons. Prenons l’exemple de l'enseigne Boulanger qui, sous couvert de transformation digitale, favorise le commerce “phygital” associant donc conseil et digitalisation, transformation à laquelle Christophe de Rolland a eu l’honneur de participer à la mise en place des premières briques de cette stratégie, en travaillant directement avec, d’une part les dirigeants du groupe et d’autre part, l’ensemble des équipes opérationnelles basées en magasin et au siège social. Son esprit de synthèse et son sens du résultat lui ont permis d’échanger efficacement avec les financiers et les actionnaires pour obtenir cette transformation réussie. Une enquête récente du Parisien place d’ailleurs “Boulanger” en numéro 1 en performance de service dans l’e-commerce en France ; qui l’eut cru il y a quelques années ?

Comme justement mentionné par Andy Dunn, il ne faut pas confondre une DNVB qui profite de la technologie pour se faire une place au soleil dans un marché déjà établi, avec les nouvelles sociétés technologiques qui peuvent se permettre  continuellement de dépenser 10% du CA en technologie et 30% en Marketing.

Certes, l'année 2020 marquée par le confinement a beaucoup avantagé les canaux de e-commerce mais elle risque aussi de laisser dans les esprits des consommateurs l’arrière goût de ce que pourrait être un monde sans magasins. Lorsque que l’on voit la “révolte” issue de la 2ème vague de confinement, on peut se dire aussi que les consommateurs sont attachés à la proximité et au contact personnalisé, tous deux liés au commerce “physique”.

Mais est-ce qu’être une DNVB signifie l’exclusion de la vente physique ? “Je ne vois pas pourquoi”, nous dit Enéas Lima qui a construit le business plan et qui a participé opérationnellement au développement de l’offre et de la plateforme marketing digitale, ainsi qu’à la définition de la structure financière et industrielle  de la start up Beaubépine. Il souligne, entre autres, que certaines DNVB se construisent sur le principe de valorisation du commerce de proximité. C’est d’ailleurs le cas de la marque Beaubépine dont l’objectif est le développement de la performance du salon de coiffure dans tous ses aspects y compris dans la commercialisation exclusive de ses produits grand public.

Malgré notre questionnement sur la pérennité de ce modèle, il faut bien reconnaître que certaines  DNVB ont bien démontré la puissance que la technologie pouvait leur apporter pour percer des murailles considérées jusque-là comme imprenables. Nous devons admettre que l’existence même de ce modèle est le signe que la transformation digitale est absolument nécessaire et vitale dans le commerce.

L’évolution technologique fait et fera constamment surgir de nouveaux besoins, et c’est dans la capacité d'adaptation des organisations que se trouve et se trouvera la clé de l’avenir des différentes formes de commerce.

Deux positions, deux façons différentes de prospecter quant à l’avenir du retail. Mais en fait, est-ce vraiment le débat ? N’est ce pas le moment que vont choisir les industriels pour reprendre le contrôle de leur avenir en gérant directement le propre devenir de leurs marques ?

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A titre d’exemple, la nouvelle proposition de ce fabricant d’électroménager.

 

Mythe ou réalité à venir ? 

Christophe de Rolland est spécialiste de la transformation des activités retail et B2B.

Enéas Lima est spécialisé en industrie et dans la transformation des organisations en B2B.

Amadeus-Executives est un groupement de dirigeants de transition, experts des projets de transformation d’entreprises et des situations d’urgence, intervenant dans des organisations de toutes tailles et dans tous les secteurs, à des postes de membres de Comité Exécutif.

 

 

Enéas Lima